Le Musée et cabinet d'histoire naturelle d'Orléans

Création d’un musée de peinture et d’un cabinet d’histoire naturelle

Le 30 décembre 1823, la municipalité annonce la création d’un musée et d’un cabinet d’histoire naturelle dans l’Hôtel des Créneaux, occupé jusqu’ici par la Cour royale et les tribunaux. La construction du nouveau Palais de justice, rue de la Bretonnerie, permet de libérer les locaux de l’ancien Hôtel-de-Ville, où il est également prévu d’installer l’école de dessin

Un appel au don est lancé pour compléter les collections de tableaux, objets d’art, d’antiquités ou d’histoire naturelle appartenant à la Ville. M. le comte de Bizemont et M. de Lockhart sont pressentis pour occuper les fonctions de conservateurs, à titre gratuit. A cette période, de nombreux objets mais aussi des manuscrits précieux sont donnés par des particuliers pour enrichir les collections publiques. Les listes des donateurs, accompagnées de la description des œuvres et des objets, sont régulièrement publiées dans le Journal général du département du Loiret.

Une grande cérémonie d’ouverture du musée a lieu le 4 novembre 1825. A cette occasion un buste de Charles X est inauguré pour le « jour de l’anniversaire de sa majesté Charles X, la deuxième année de son règne ».

Le premier règlement du musée et du cabinet d’histoire naturelle est publié le 13 septembre 1825, peu avant l’ouverture définitive au public. La vocation de l’établissement apparait clairement dans le document : constitution, conservation et protection des collections, travaux d’inventaire, ouverture au public. Sous l’impulsion des sociétés savantes, les musées d’histoire naturelle qui se multiplient en province à cette époque, sont des lieux dédiés à la recherche et à la transmission des savoirs scientifiques. Ils sont généralement dotés de bibliothèques et accueillent un large public, dont les scolaires. Dès 1840, l’enseignement des sciences et des techniques devient obligatoire dans les lycées, puis plus tard en 1880, les leçons de choses apparaissent dans les écoles primaires.

 

Les collections

Avec l’enrichissement des collections, le cabinet d’histoire naturelle devient musée d’histoire naturelle au cours de la première moitié du 19e siècle. Les premiers rapports annuels d’activité conservés dans les archives datent de 1864, année où le conservateur André Edme Amédée Nouel succède à Charles François Lockhart.

Le musée se compose alors d’une importante collection de zoologie, avec des pièces exotiques assez rares et intéressantes pour l’étude. La collection d’oiseaux qui est la plus riche et la plus complète de l’établissement, suscite un grand intérêt de la part du public. Le musée est également doté de collections de minéralogie et de géologie, ainsi que d’une riche collection conchyliologique. La collection de botanique comprend l’herbier d’Auguste de Saint-Hilaire jugé en excellent état de conservation. Il est décrit comme remarquable par le nombre des plantes et le soin avec lequel il est réalisé.

Les objets proviennent de dons, certains très importants comme par exemple celui de l’Amiral de Candé en 1888 qui compte 180 oiseaux des Antilles et de l’Amérique méridionale, des coquillages, des insectes exotiques. L’établissement reçoit aussi de nombreuses offres d’achat. Le Musée d’histoire naturelle de Paris participe également à l’enrichissement des musées de province.

Nouel développe des collections régionales avec la mise en place d’un herbier local et d’une collection ornithologique du département. Il souhaite accroître la collection d’ostéologie des animaux en raison de la richesse de la région. Pour la paléontologie, une remarquable collection d’ossements fossiles en provenance des sablières des environs est la principale richesse du musée d’Orléans. Connue des savants et citée dans les ouvrages scientifiques, elle est due aux recherches de Lockaert et du conservateur adjoint François Gabriel Thion. 

C’est l’œuvre que poursuivent les conservateurs, Henry Pierre Sainjon de 1888 à 1909, puis Emile Trahard de 1909 à 1944. A la fin du 19e siècle, les collections d’Orléans comprennent deux séries distinctes : la collection générale classée en série A et la collection régionale en série B. Si la collection générale est celle qui remporte le plus de succès auprès du public, sa constitution comporte un coût contrairement à la collection régionale qui est le fruit de collectes effectuées par des bonnes volontés. Dès 1904, la faune et la flore du Loiret sont représentées presque intégralement.

 

 Les herbiers d’Auguste de Saint-Hilaire

Augustin François César Prouvansal de Saint-Hilaire, dit Auguste de Saint-Hilaire, est né à Orléans le 4 octobre 1779, il meurt le 30 septembre 1853 dans sa propriété de La Turpinière à Sennely. Naturaliste et botaniste français de renom, il effectue un voyage d’exploration au Brésil de 1816 à 1822. Il publie plusieurs ouvrages de référence où il décrit la flore de ce pays et constitue un herbier qui est aujourd’hui conservé au musée d’histoire naturelle de Paris.

Dans son testament du 29 avril 1848, il lègue au musée d’Orléans tous les objets d’histoire naturelle et de curiosité lui appartenant. La collection comprend notamment ses herbiers qui sont décrits ainsi dans le courrier adressé en 1853 par le notaire au directeur du musée, Lockhart : « son herbier de France renfermé dans des boîtes de bois du Brésil ainsi que toutes les plantes par lui recueillies, soit en France, soit en Suisse ». Il lègue également au musée de peinture d’Orléans les dessins originaux de la flore du Brésil dessinés par M. Turpin. L’auteur est considéré alors comme « l’un des plus habiles peintres d’histoire naturelle scientifique ».

 

A consulter : Blog du Musée scientifique de Pinhais, Brésil

A consulter : Herbier virtuel d'Auguste de Saint-Hilaire  

 

Les visiteurs

Ouvert à un large public dès sa création, c’est probablement lors de la Première Guerre mondiale que le musée reste fermé pour la première fois. Le manque d’effectif, tout comme le manque de chauffage, créent des conditions d’accueil difficile et la vie de l’établissement est suspendue durant la première année du conflit.

Sa réouverture est motivée par la possibilité de recevoir des réfugiés, des blessés, des permissionnaires, des officiers convalescents, qui viennent pour se distraire et s’instruire. Le conservateur Emile Trahard s’implique lui-même dans l’accueil des visiteurs et fourni des explications. Malgré l’obligation de fermer certaines salles, il tente de poursuivre l’enrichissement des collections et d’améliorer les locaux. En 1919, c’est toutefois un rapport alarmant sur l’état général du bâtiment qu’il adresse à la municipalité. Une réfection complète du monument historique s’opère à partir de 1920, sa réouverture à lieu le 20 novembre 1921.

A partir de 1921, les actions pédagogiques et les statistiques de fréquentation sont consignées dans les rapports d’activités. Environ 800 enfants des écoles communales sont accueillis chaque année par le conservateur qui organise des causeries sur des thèmes variés : les grands animaux de la mer, la protection des petits oiseaux, la question du logement chez les animaux, etc. Le musée accueille aussi des visiteurs venus des départements voisins. En 1935, les entrées gratuites s’élèvent à plusieurs centaines par mois, les entrées payantes dépassent les 1 000 visiteurs par an.

 

Un musée mixte

Le bâtiment de l’ancien Hôtel-de-Ville se révèle assez peu adapté pour accueillir le nouveau musée orléanais et ses collections composées à la fois des Beaux-Arts, de l’archéologie et de l’histoire naturelle.

C’est très tôt que le musée historique est séparé du musée de peinture. L’Hôtel Cabu est acheté en 1862 pour y transférer les collections du musée historique trop à l’étroit dans l’Hôtel des Créneaux. Malgré le déplacement des collections archéologiques, la dimension du musée reste insuffisante. En 1886, un projet d’extension des salles dédiées aux Beaux-Arts sur la place de la République et la rue Louis-Roguet ne voit pas le jour. En 1903, la Ville lance un grand concours public d’architecture pour la reconstruction des musées de peinture et d’histoire naturelle. Plusieurs architectes de renoms participent à ce programme qui reste sans suite.

 

Les dommages de guerre

En septembre 1939, le conservateur déplore que les collections ne puissent pas être mises à l’abri des bombardements. Fermé entre 1939 et 1940, le musée est épargné par les destructions du centre-ville survenues en juin 1940. L’activité est suspendue en 1941, puis connaît un fort ralentissement jusqu’en 1942. Le musée historique, le musée Jeanne-d’Arc et le musée Paul-Fourché sont quant à eux gravement touchés ou détruits. C’est en 1942 que la Société des amis des musées est créée pour aider à leur reconstruction. Elle comprend les 3 sections : Beaux-Arts, archéologie et histoire naturelle représentée par Paul Edmond Sougy, qui prend la direction du musée en 1944.

Paul Sougy entreprend une réorganisation et une modernisation du musée qui s’intitule désormais : musée des sciences naturelles. A partir de 1946, des expositions temporaires sont organisées régulièrement, les établissements scolaires sont invités à utiliser les salles du musée pour illustrer les leçons dispensées dans les lycées et les collèges. Toutefois le développement de l’établissement est freiné par la vétusté et l’exiguïté des locaux.

Dès l’après-guerre, le muséum national d’histoire naturelle de Paris veut donner une nouvelle impulsion aux collections constituées sur l’ensemble du pays. Il crée un service national de muséologie ainsi qu’une commission nationale des collections publiques d’histoire naturelle pour classer les musées de province. Des conseils techniques et scientifiques ainsi que des subventions bénéficient à ces établissements. En juillet 1950, le conseil municipal d’Orléans est favorable au classement de son musée en deuxième catégorie, ce qui lui confère un nouveau statut de centre de documentation régional.

En 1954, l’association des naturalistes orléanais souhaite que la municipalité se prononce sur le projet de construction d’un nouveau musée dédié entièrement aux collections d’histoire naturelle.

 

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