Regard d'un soldat allemand anonyme

Photographies des troupes allemandes

En 2006, en Allemagne, à la mort de son père, ancien soldat de la Wehrmacht, un homme découvre des photographies. Celles-ci représentent la vie des soldats durant la Seconde Guerre mondiale. Il y a les campements, les moments de repos, les villes traversées et détruites et, plus effroyables, les corps de blessés ou de morts. N'ayant pas pensé que son père ait pu être le témoin de tels moments voire l'auteur de tels actes durant son passé, cet homme projette un moment de détruire les images. Mais, progressivement, il pense, grâce à l'un de ses collègues français, qu'elles peuvent aussi servir de témoignage historique. Déchiffrant le nom d'Orléans à l'arrière de certaines photographies, il décide de faire don d'une majorité des clichés à la Ville, pourtant conscient de l'émotion que causeront ces images aux Orléanais. En 2010, les Archives municipales reçoivent 102 clichés originaux ou copiés sur CD-ROM.

Les photographies portent sur une unité militaire sans armement du Service du Travail du Reich (Reichsarbeitsdienst) de Losheim (Sarre), dans laquelle le père du donateur a été incorporé dès 1938. Elles illustrent aussi la campagne de France, dont le passage à Orléans, et la campagne de Russie. Le père du donateur a participé aux deux campagnes. Il fut blessé au cours de la seconde et rapatrié en Allemagne.

Ce fonds a bien sûr un intérêt pour l'histoire locale puisqu'il montre la ville d'Orléans dans les premiers jours ou semaines qui suivent l'entrée allemande. Il contient notamment des images inédites de l'entrée des troupes par le pont de Vierzon. Au niveau national et international, il peut aussi constituer un témoignage singulier. D'une part, il y a la vie de tous les jours des jeunes soldats allemands. Les photographies représentant les remises de médailles et la vie de campement dans la campagne française feraient presque oublier que c'est la guerre. Elles contrastent très durement avec celles représentant les routes de l'exode, les villes dévastées, les soldats français sans doute prisonniers ou encore les corps de soldats blessés ou morts. Il s'agit de la guerre vue au travers du regard des soldats allemands, à la fois témoins et auteurs des faits. Plusieurs photographies portent des annotations au dos. Comme un journal intime, l'auteur indique parfois où il se trouve et fait surtout le constat de ce qu'il voit.

Plusieurs photographies évoquent les troupes françaises dites indigènes ou coloniales. Les jeunes soldats allemands ne restèrent, pour le moins, pas indifférents devant des populations qu'ils n'avaient peut-être jamais eu l'occasion de rencontrer. Pour les garder en mémoire, ils prirent là encore des clichés. Une annotation à l'arrière d'un portrait d'un soldat africain nous donne une idée du ressenti allemand lors de la rencontre : "celui qui a vu ce genre de gars peut avoir peur". En effet, le soldat africain fixe l'objectif et ne paraît pas impressionné du tout. Cette rencontre donne finalement naissance à de très beaux portraits des soldats maghrébins et africains et constitue là aussi un témoignage historique intéressant l'histoire nationale et internationale.

La volonté du donateur étant que les clichés servent de témoignage, les Archives municipales proposent ici une sélection d'images. L'ensemble des photographies et l'inventaire sont consultables en salle de lecture des Archives municipales. L'inventaire des photographies sera prochainement consultable et interrogeable en ligne dans la partie "instruments de recherche".

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