Késako ?

Dans le ChallengeAZ, rien n'interdit de s'accorder une petite détente. Pour la lettre K, nous vous proposons donc un article sous forme de petite devinette...

Kézako, ce gros registre ?

Je date de 1782. Je fais partie des archives anciennes de la Ville d’Orléans qui ont survécu à l’incendie de juin 1940. Je suis conservé en dépôt aux Archives départementales du Loiret et ne suis désormais consultable que sous forme de microfilm et c’est tant mieux ! En effet, je suis bien lourd à soulever et pas facilement manipulable. Je mesure 41 centimètres de haut pour 28 centimètres de large. L’épaisseur de ma reliure est de 11,6 centimètres. Il faut bien cela pour retenir mes 760 pages !

L’archiviste qui m’a classé au 19e siècle m’a répertorié en série CC, sous la cote CC114. Je suis donc une pièce relative aux finances, à l’imposition ou à la comptabilité. Dans l’inventaire, l’analyse indique que je concerne les négociants nobles et privilégiés (au nombre de 32) et les bourgeois, marchands et artisans d’Orléans. Je suis ce qu’on appelle « un rôle », une sorte de liste, et j’ai été dressé par Seurrat de Guilleville, maire d’Orléans, Crignon Sinson, Miron Detroyes, échevins et de Cypierre, intendant.

Je suis… je suis… le rôle de capitation de 1782 ! Il n’y a qu’à me retourner – délicatement – c’est écrit à la plume sur l’une de mes tranches ! Et sur ma page de couverture aussi d’ailleurs !

Mais Kézako, la capitation ?

La capitation est un impôt direct établi en France en 1695 par Louis XIV pour financer la guerre dite de la Ligue d’Augsbourg, menée entre 1688 et 1697 contre une coalition composée de plusieurs pays européens. Cet impôt touchait normalement les trois ordres du royaume à savoir le clergé, la noblesse et le tiers état. Seuls les ordres religieux qualifiés de « mendiants », comme les Carmes, les Franciscains ou encore les Dominicains, en étaient exempts. C’était aussi le cas des pauvres qui payaient moins de quarante sols pour s’acquitter de l’impôt de la taille.

Reposant sur le foyer fiscal, la capitation était nominative. La population du royaume était répartie en 22 classes basées sur le rang, la fonction et la richesse. A l’intérieur d’une même classe, chaque personne devait payer le même montant. La première classe payait ainsi 2 000 livres contre 1 livre pour la dernière. Le clergé obtint de payer l’impôt en une seule fois pour ses membres en versant le « don gratuit ».

Cet impôt cessa d’être prélevé à compter du 1er avril 1698. Mais, il est rétabli en 1701 pour financer la guerre de succession d’Espagne. Le système de répartition évolue d’ailleurs à cette occasion. Les généralités sont chargées de la collecte auprès de la population. Cet impôt perdure alors jusqu’à la fin de l’Ancien Régime.

Et le rôle dans tout ça ?

Le rôle, quant à lui, n’est ni plus ni moins que le nom du document qui permet d’assurer le suivi de la collecte et sur lequel sont enregistrés le nom des contribuables et la somme due. Le terme « rôle » n’est pas spécifique aux documents fiscaux. Il est couramment employé pour des documents d’Ancien Régime. Etymologiquement, il évoque un rouleau composé de morceaux de parchemins ou de papier, assemblés les uns aux autres et sur lequel on enregistrait des actes. Par extension, le terme fut progressivement employé pour désigner des actes enregistrés sous forme de registre, notamment dans le cadre des recensements de population ou de la levée des contributions et des taxes.

En généalogie, les rôles sont souvent des pièces à étudier de près puisqu’ils regorgent d’informations relatives aux individus. Dans le cas de la capitation, puisque celle-ci portait normalement sur tous les individus sauf quelques exceptions ciblées, il est normalement possible de retrouver un ancêtre quel que soit son rang et ainsi d’avoir une idée de son niveau de fortune en fonction de la somme qu’il acquittait.

En savoir plus sur la capitation

 

Les archives anciennes d'Orléans
Les archives anciennes d'Orléans

Date de modification : 27 janvier 2018

Partager sur