Bois : couleurs cachées, à découvrir et imaginer

A Orléans, 400 maisons auraient une façade à pans de bois dont 150 environ dateraient du Moyen-Age et de la Renaissance. Depuis 2000, un programme de ravalement permet de dater les maisons, d’étudier les techniques de construction et les couleurs. Ce vaste chantier montre combien il est difficile d’appréhender la couleur d’origine des édifices. En l’absence de sources écrites précises, d’images d’archives en couleur et en raison des interventions successives sur les édifices, un travail de dendrochronologie mené par les archéologues du bâti est souvent nécessaire pour retrouver, si ce n’est le pigment d’origine, ceux qui se sont succédés dans le temps. Aujourd’hui, le centre ancien est métamorphosé par des couleurs restituées qu’on avait peine à imaginer il y a encore une décennie. Les couleurs sont le fruit de choix basés sur des études. Individuellement, chaque maison donne une idée de ce nos prédécesseurs pouvaient voir à une période donnée. Malgré ce travail, nos yeux d’aujourd’hui ne peuvent appréhender complètement les couleurs de la ville telles qu’elles étaient au Moyen-Age ou à la Renaissance.

Les pans de bois colorés au Moyen-Age et à la Renaissance subissent les effets de mode dès la fin du XVIIIe siècle. Sous l’influence du courant hygiéniste, les façades à pans de bois sont blanchies. En 1824, dans une optique de lutte contre la propagation des incendies, un arrêté ordonne aux propriétaires de faire recouvrir leurs façades en bois de lattes, de clous et de plâtre. Les sculptures en saillies sont parfois bûchées, les pans de bois et enseignes colorées disparaissent du regard. Au XIXe siècle, des maisons médiévales ne sont pas sauvegardées comme dans le secteur des halles du Châtelet où tout un quartier est détruit. Dans les années 1960 et 1970, il en est de même dans le quartier de la Charpenterie qui fait place à un marché couvert. Lorsque les pans de bois sont restaurés ou reconstruits, ils subissent les influences du moment, comme la mode du rustique dans les années 1970-1980.

Jusqu’à des périodes très contemporaines, le bois est plutôt utilisé pour des constructions qui n’ont pas à durer dans le temps. Les baraquements implantés en grande partie sur les mails et destinés à loger les sinistrés après la Seconde Guerre mondiale en sont l’exemple.

Le marché de la Charpenterie, inauguré en 1971, fait figure d’exception. Associé à des carreaux de grès colorés au sol, ces « champignons » donnent alors une touche de couleurs dans un quartier à l’époque plutôt gris. Ils sont détruits à la fin des années 1990 à un moment où la rénovation du quartier est programmée.

En 1967, la maison du futur, présentée aux Floralies, préfigure étrangement du retour en grâce du bois tel qu’on le connaît dans les constructions de ce début des années 2010. Peint ou en teinte naturelle, le bois est désormais associé à l’idée environnementale promue dans la construction contemporaine.

 

En savoir plus ? 

Alix (Clément), «  Les maisons en pan de bois d’Orléans du XIVe au début du XVIIe siècle : bilan de treize années de recherche », dans Alix (C.), Épaud (F.) dir., La construction en pan de bois au Moyen Âge et à la Renaissance, PUR/PUFR, 2013, p. 221-270

Alix (Clément), « Les traitements colorés des façades en pan-de-bois du XIXe au XVIIIe siècle. L'exemple des maisons d'Orleans », dans Esquieu (Y.) dir., Les couleurs de la ville. Réalités historiques et pratiques contemporaines, Presses univeristaires de Provence, 2016, p. 111-130.

 
Partager sur