Enfants en nourrice

L’abandon d’enfant est un phénomène très ancien.

Pour éviter les sanctions de la peine capitale en cas d’abandon d’enfant, les parents prennent  l’habitude d’offrir l’enfant à l’Eglise. L’enfant grandissait dans un couvent. En France, cette pratique remonte au IVe siècle. Le risque pour les parents était d’être jugés pour infanticide et condamnés à mort.

La première structure mise en place pour la réception des enfants abandonnés est celle de Saint Vincent de Paul en 1638, qui crée « l’œuvre des Enfants trouvés de Paris » qui devient ensuite la « Maison de la Couche ». Cet établissement est officialisé en 1670 et bénéficie d’une administration solide et de ressources régulières.

Pour éviter la mort de l’enfant selon le lieu où il est déposé (la rue, les porches, dans la campagne), on installe dès le début du XVIIIe siècle ce que l’on appelle des tours (tourniquet creusé dans l’épaisseur du mur des hôpitaux et des couvents). L’enfant y était déposé dans l’anonymat. Un procès-verbal de naissance d’enfant exposé était établi par la mairie suite aux déclarations du personnel de l’hôpital. La tenue vestimentaire y était décrite ainsi que les objets laissés avec l’enfant. Il y est parfois fait mention des mots laissés par la mère précisant notamment le prénom des nourrissons. Le patronyme était choisi par le personnel de l’hôpital. A la suite de ce procès-verbal était dressé un acte d’état civil dans les registres de naissances de la commune.

A la Révolution, la Nation déclare prendre en charge les enfants, les accueillir et les éduquer. La loi de Messidor An V encadre le placement en nourrices. Indépendamment d’une pension, elles reçoivent également une indemnité de 18 francs pendant les neuf premiers mois de la vie des enfants. Sur présentation d’un certificat de bonne conduite, la nourrice peut prétendre, « si l’enfant a été conservé jusqu’à l’âge de 12 ans d’accident provenant de défaut de soins », à une indemnité de 50 francs. Les enfants abandonnés sont élevés par les nourrices jusqu’à l’âge de 12 ans. Elles s’engagent à les nourrir, les entretenir convenablement, les envoyer à l’école primaire. Elles peuvent aussi garder les enfants qui leur ont été confiés au-delà de 12 ans. Elles se chargent alors de leur faire apprendre un métier ou les appliquer aux travaux de l’agriculture.

L’Etat met en place, outre l’aide aux mères célibataires, le service des Enfants assistés en 1811. L’état devient alors tuteur de l’enfant. La méthode du Tour ayant conduit à une hausse des abandons, celle-ci est abandonnée progressivement dès le milieu du XIXe siècle. Ainsi à Orléans le tour est supprimé le 1er février 1857. Alors les enfants abandonnés sont reçus « à bureau ouvert ». Ils sont admis dans les locaux de l’administration sans formalité et sur simple déclaration orale. Certains enfants sont toujours placés en nourrice. Selon le décret du 19 janvier 1811 concernant les enfants trouvés ou abandonnés et les orphelins pauvres, les mois de nourrice et les pensions sont payés d’après les certificats établis par les maires. Les maires attestent, chaque mois, avoir vus les enfants. Chaque enfant est visité au moins deux fois l’année par un médecin. Les enfants élevés à la charge de l’Etat sont entièrement à sa disposition. Les enfants à l’âge de douze ans sont mis en apprentissage : les garçons chez les laboureurs et artisans et les filles chez des ménagères, des couturières ou autre ouvrières, ou dans des fabriques et manufactures. Les contrats d’apprentissage ne stipulent aucune somme en faveur ni du maître, ni de l’apprenti ; mais ils garantissent au maître les services gratuits de l’apprenti jusqu’à l’âge de vingt-cinq ans, et à l’apprenti la nourriture, l’entretien et le logement. Le suivi des enfants et des nourrices par les maires engendrent une production administrative que l’on retrouve dans les archives communales de nos jours (registres des nourrices, livrets d’enfants en nourrice, certificats de nourrice…).

L’Assistance publique voit le jour en 1849. Le Préfet est chargé de la direction du service des Enfants assistés par les lois de 1874 et 1877. Les enfants placés en nourrice sont surveillés par des médecins et des personnes faisant partie du comité local de surveillance des enfants du 1er âge. Ces personnes, essentiellement des femmes, sont désignées par arrêté préfectoral. De son côté, le Maire tient des registres de placements. A Orléans, il en existe jusqu’en 1968.

Les enfants assistés deviennent « pupille de l’Etat » et sont confié à la tutelle du Préfet. La loi du 27 juin 1904 donne naissance à l’Assistance publique, qui prend le nom de l’Aide sociale à l’enfance par décret du 24 janvier 1956. En 1964, ces services sont intégrés aux directions régionales des affaires sanitaires et sociales, appelé en 1977 directions départementales puis en 1985 directions de l’action sociale de l’enfance et de la santé.

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