Orléans-La Source : "Orléans II"

Un projet d’Université

A la fin des années 50, les premiers collèges universitaires et scientifiques sont créés dans plusieurs villes françaises. La municipalité du député-maire Pierre Ségelle est alors favorable à la création d’un établissement d’enseignement supérieur qui fait défaut à Orléans. Selon le ministère de l’Education nationale, la ville ne peut toutefois pas être inclue dans la première série des réalisations, car elle ne dispose ni du personnel enseignant qualifié, ni des équipements et des locaux nécessaires.

En juillet 1959, le nouveau maire Roger Secrétain et le conseil municipal se penchent à nouveau sur l’avenir universitaire d’Orléans. C’est vers un objectif ambitieux que s’oriente alors le projet orléanais, celui de répondre aux besoins de décentralisation des universités parisiennes. Située à 120 kms de Paris, Orléans occupe une situation favorable pour envisager l’implantation et le développement de futurs établissements et annexes de toutes natures, de locaux d’habitation et d’internat du personnel et des étudiants. C’est le domaine boisé de La Source d’une superficie de 410 hectares qui est pressenti pour le projet. Le conseil municipal vote alors la demande de déclaration d’utilité publique de l’opération, ainsi que l’ouverture de négociations pour l’acquisition des terrains situés alors sur la commune de Saint-Cyr-en-Val.

L’acquisition du domaine, réalisée pour moitié avec le Département du Loiret, est votée le 30 octobre 1959 pour un montant de 110 millions de francs (anciens francs). En 1960, la Ville envisage d’acquérir des terrains complémentaires sur une partie de la propriété de Concyr, du côté du bourg et de la gare de Saint-Cyr-en-Val, en bordure de la ligne de chemin de fer. Pouvant permettre l’implantation de laboratoires et d’installations scientifiques, cette réserve foncière de 155 hectares est acquise par la Ville et le Département du Loiret en 1961 pour la somme de 680 000 francs (nouveaux francs). Par arrêté préfectoral du 26 avril 1962, les domaines de La Source et de Concyr sont officiellement rattachés à la commune d’Orléans.

Le collège scientifique universitaire dépendant de la faculté des sciences de Paris est créé à Orléans par arrêté ministériel du 2 août 1960. Il s'installe provisoirement au château de La Source dans l’attente de la construction de locaux définitifs.

Ci-dessous : Source du Loiret. Le château. Carte postale. Avant 1903. Archives municipales et métropolitaines d'Orléans, 2Fi671

Une ville « satellite »

C’est aussi à un besoin d’expansion d’Orléans que répond le choix d’implanter la nouvelle Université au sud de la Loire, car la ville est rattrapée par le développement de ses communes périphériques. C’est ainsi que l’exprime le maire Roger Secrétain, en précisant les orientations du projet en séance du conseil municipal du 25 novembre 1960 : « Nous ne pouvons pas nous borner à considérer que La Source sera uniquement employée à des fins universitaires. Nous pensons que d’autres éléments viendront s’ajouter à ce projet ».

Le Département du Loiret et la Ville désignent la société d'économie mixte orléanaise, la SEMPEL pour se charger de l’étude complète de la mise en valeur du domaine. Le maire précise que le programme d’action de la Société sera défini : « par des enquêtes menées auprès des autorités locales administratives et élues, des industriels de la région, des différents ministères et Grandes Ecoles qui peuvent être intéressées, de la grande industrie privée, de ses laboratoires, des instituts de recherche publics et privés, etc. ».

C’est l’avènement d’une ville entièrement nouvelle que dessine alors Roger Secrétain : « une zone d’habitation s’impose tout naturellement. En raison de la nature des lieux, elle pourra être tout particulièrement verte. Elle comportera d’abord une Cité Universitaire, de vastes terrains de sports, des logements pour les professeurs, les industriels et leur main-d’œuvre, et même d’autres éléments de population qui voudraient s’installer à La Source pour être à la campagne tout en restant à proximité d’un grand centre ».

L’urbaniste et architecte Louis Arretche ainsi que l’architecte Olivier-Clément Cacoub sont choisis en concertation avec le ministère de la Construction et le ministère de l’Education nationale.

C’est une opération d’urbanisme d’envergure qui s’engage selon un grand schéma d’ensemble : l’aménagement d’un parc floral autour de la source du Loiret et du château ; au sud, l’implantation du campus universitaire et des installations du Centre national de la recherche scientifique (CNRS) ; vers le sud et l’ouest, un centre urbain doté de logements, d’équipements commerciaux, scolaires, culturels, etc. ; vers Saint-Cyr-en-Val, une zone industrielle pour l’implantation des entreprises créatrices d’emplois.

Ci-dessous : Vue aérienne dans le secteur du château de La Source. Photographie. Vers 1960.

Archives municipales et métropolitaines d'Orléans, 11Fi75

L’urgence du logement

En mars 1962, le maire, Roger Secrétain, indique que Pierre Sudreau, ministre de la Construction et maire de Blois, confirme son accord pour financer, dès 1963, « un programme de 1 000 HLM dans le domaine de La Source. (…) Ce programme sera poursuivi de telle manière que mille logements de tout nature puissent être construits chaque année en liaison avec l’Université ».

Le cap est fixé pour cet immense chantier d’édification de l’ensemble universitaire et urbain de La Source, dont le plan de masse est dressé par l'architecte en chef Louis Arretche.

Faisant intervenir de nombreux maîtres d’ouvrages, la ville nouvelle de La Source se construit en un temps record, la priorité étant donnée au logement. Le premier chantier décidé par le ministère de la Construction débute en 1963 avec le dépôt du permis de construire de 8 bâtiments et 518 logements destinés aux rapatriés d’Algérie : c’est la résidence Beauchamps dont les premiers occupants s’installent dès 1964.

Les premiers programmes d’habitat collectif construits à La Source sont devenus emblématiques et vont marquer durablement l’identité de la ville nouvelle. 41 bâtiments d’habitation et 1 203 logements sont édifiés dès 1964 le long de l’allée Camille-Flammarion (actuelle rue Henri-Troyat). Puis, entre 1965 et 1969, les tours et barres d’immeubles s’élèvent rue André-Gide (6 bâtiments de 4 à 7 étages, 160 logements et 178 parkings, prévus pour les personnels du CNRS et du Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), place du Val (2 bâtiments et 90 logements), sur « La Dalle » les premières tours de 10 étages de la résidence des Bois (3 bâtiments et 196 logements). La monumentale tour de 17 étages et 270 logements, dite la « T17 », est achevée en 1969. Elle fait partie du programme de 1 217 logements prévus pour l’installation des personnels des Postes, télégraphes et téléphones (PTT). Le Centre de tri des Chèques postaux ouvre en novembre 1968 avec ses 500 premiers employés (1).

Entre 1963 et 1983, 5 326 logements, constituant l’essentiel de l’habitat collectif à La Source, sont construits et mis en service (2).

 (1) A lire sur l’histoire du Centre de tri des chèques postaux : « Retour à La Source. Une histoire du centre financier d’Orléans-La Source. La Banque Postale. Octobre 2021 ». Ouvrage consultable en salle de lecture des Archives d’Orléans, cote US 384.

 (2) Données tirées de l’étude de Gérard Sustrac, « Le développement de La Source : une histoire pleine d’enseignements ». Pages 27 à 29. Ouvrage consultable aux Archives d’Orléans, US 233.

Ci-dessous : La Source. Vue aérienne de la nouvelle ville et du Campus universitaire. Document imprimé. Vers 1972.

Archives municipales d’Orléans, sans cote. Cliché : Jean Malard

La Source. Les immeubles de "La Dalle" qui surplombent l’Avenue du Président-John-Kennedy et ses abords en cours de finition. Photographie. Sans date. Archives du GEMAO
La Source. Les immeubles de "La Dalle" qui surplombent l’Avenue du Président-John-Kennedy et ses abords en cours de finition. Photographie. Sans date. Archives du GEMAO

"Le gardien des plaines". Sculpture en fer blanc du sculpteur BlackBear Bosin, dit "Ours Noir". Archives du GEMAO. La Tribune d'Orléans N°36, 1977
"Le gardien des plaines". Sculpture en fer blanc du sculpteur BlackBear Bosin, dit "Ours Noir". Archives du GEMAO. La Tribune d'Orléans N°36, 1977

Communément appelé "L'Indien", cette sculpture est offerte à la Ville d'Orléans par Wichita, sa ville jumelle d'Amérique. L'Indien est devenu la figure emblématique d'Orléans-La Source

La Source en chantier. Photographie. 1970. Archives du GEMAO
La Source en chantier. Photographie. 1970. Archives du GEMAO

"Les habitants l'appellent... le mur de Berlin". Orléans Tribune N°4, 1970. Cliché : Robert Chabbert

La Source. Jour de marché. A l’arrière-plan, le bâtiment du Centre de tri des chèques postaux  (Centre financier des PTT). Photographie. Sans date. Archives du GEMAO
La Source. Jour de marché. A l’arrière-plan, le bâtiment du Centre de tri des chèques postaux (Centre financier des PTT). Photographie. Sans date. Archives du GEMAO

La Source. Air de jeux et bac à sable, au bas des immeubles. Photographie. Sans Date. Archives du GEMAO
La Source. Air de jeux et bac à sable, au bas des immeubles. Photographie. Sans Date. Archives du GEMAO

Logement collectif, logement individuel

En contraste avec la laideur et la monotonie dénoncées des tours et barres d’immeubles, 3 bâtiments construits à « La Bolière » par l’Office municipal d’HLM proposent une architecture originale. Ce modèle appelé « Maison jardin » est le fruit d’un concours organisé par le ministère de l’Equipement en 1973-1974 pour encourager l’innovation. Cette initiative reste toutefois un cas d’exception dans le paysage Sourcien. C’est d’ailleurs en 1974, que l’Etat décide de mettre fin à la construction de grands ensembles porteurs, selon lui, de « ségrégation sociale ».

La demande est également forte en matière de logement individuel, plusieurs programmes pavillonnaires, qui marquent durablement le paysage urbain de La Source, débutent en 1966. Parmi le plus connu, l’ensemble de « l’Orée de Sologne » est construit à partir de 1972 autour d’un lac artificiel. Le plan d’eau de 8 hectares est creusé pour agrémenter l’environnement futur des 412 maisons individuelles construites en 4 tranches jusqu’en 1978.

En 1982, on recense 20 554 habitants à La Source, soit 16% de la population d’Orléans.

► Parcourir l’exposition virtuelle sur l’histoire de la création de la ville nouvelle d’Orléans-La Source : « Retour à La Source : les premières années d'un quartier orléanais ».

La Source. Quartier de la Bolière. L’un des 3 immeubles de l’Office municipal d’HLM comprenant au total 150 logements. Photographie. 1977. Archives du GEMAO
La Source. Quartier de la Bolière. L’un des 3 immeubles de l’Office municipal d’HLM comprenant au total 150 logements. Photographie. 1977. Archives du GEMAO

"Des HLM qui sortent de la médiocrité. Une architecture nouvelle au milieu des tours et des barres". La Tribune d’Orléans N°36, 1977  

La Source. Programme pavillonnaire de l’Orée de Sologne. Photographie. Années 70. Archives du GEMAO
La Source. Programme pavillonnaire de l’Orée de Sologne. Photographie. Années 70. Archives du GEMAO
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