Vie d'ordures

1790-1980 : Orléans, une ville face au défi des déchets

À la Révolution française, les municipalités se voient confier la surveillance de la voie publique, et notamment de tout ce qui est de nature à l’encombrer. Les déchets, qu’on appelle alors les « boues et immondices », en font partie. Jusqu’en 1918, le ramassage est délégué par la Ville d’Orléans à des entrepreneurs. Les cahiers des charges nous renseignent sommairement sur la gestion des ordures au 19e siècle. Les « boues » sont les déchets liquides faits de terres, poussières mais aussi des matières fécales animales et humaines. À une époque où le réseau d’égout n’existe pas, les habitants remplissent des baquets appelés tinettes, qu’il faut vider. Les immondices, entassées à même la chaussée, sont constituées de résidus de cuisine ou des marchés, de bêtes mortes, de faïences, verreries et vaisselles, de matériaux de chantiers ou encore de la paille souillée liée à la présence importante de chevaux pour le transport. Une partie des déchets sert d’engrais dans les exploitations orléanaises. L’autre est vidée dans les dépotoirs. 

La Grande Guerre va marquer un grand tournant. La mobilisation du personnel et des chevaux empêche l’entrepreneur d’assumer sa mission. À la faveur d’un très rigoureux où la situation sanitaire semble déplorable dans les rues d’Orléans, la municipalité reprend la gestion des ordures ménagères à son compte. Débute alors une longue histoire bien documentée par les archives municipales. Leur lecture montre que la tâche est herculéenne et sans fin puisqu’elle relève autant de l’organisation pratique, de l’acquisition et la maintenance de matériels toujours mieux adaptés que de l’éducation de la population dont les mauvaises habitudes sont souvent bien ancrées ! L’enjeu porte essentiellement sur la régulation de l’hygiène publique et la propagation des bactéries. L’environnement n’est que peu évoqué. 

Jusqu’à la fin du 20e siècle, les archives nous renseignent sur les conditions de travail des agents, les circuits et matériels de collecte, la difficile adoption de la boîte à ordures par les Orléanais ou encore sur le devenir des déchets. La construction d’usines de traitement et la mise en place de la collecte hermétique puis sélective sont des marqueurs de la fin du 20e siècle et qui montrent combien le chemin parcouru fut conséquent en deux siècles ! Question d’envergure, la gestion des déchets est l’un des socles de l’intercommunalité lors de la création du Syndicat à vocation multiple de l’agglomération orléanaise en 1964.

Sans prétendre à l’exhaustivité face à des sources à la fois abondantes et paradoxalement lacunaires, « Vies d’ordures – 1790-1980 : Orléans, une ville face au défi des déchets » a pour but d’interroger, étonner et donner un coup de projecteur sur une mission de service public nécessaire et utile à tous et dont l’histoire s’inscrit dans la durée ! Le lecteur sera ainsi peut-être amusé par la découverte du mot « canche » ou encore stupéfait d’apprendre qu’une flotte de camions-bennes électriques circulaient à Orléans dès la fin des années 1930. Surtout, nous espérons que cette ébauche d’historique attisera la curiosité des chercheurs. Rappelons que tous les dossiers d’archives peuvent être directement consultés par tous dans la salle de lecture des Archives d’Orléans.

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